L'élargissement de 32 à 48 équipes pour le Mondial-2026 décidé mardi par la Fifa a été salué, mais a aussi rapidement fait grincer les dents de certains acteurs de la planète foot. Réactions.
"J'y suis favorable, mais il aurait fallu aller au bout de leur logique plutôt que d'être démago et de vouloir faire plaisir à tout le monde", insiste Claude Le Roy. "Il aurait fallu proposer huit groupes de six équipes, ce qui garantissait cinq matches à chacune, voilà ce qu'il aurait fallu faire si on avait voulu accoutumer les petites équipes à la haute compétition. En qualifiant les deux premiers directement pour les quarts de finale, on aurait ainsi permis à la fois aux petites équipes d'apprendre et favorisé la haute compétition en qualifiant vraiment les meilleures."
Une remise en cause du format qui prouve, selon le sélectionneur du Togo, que la décision est surtout politique, même s'il est "favorable au Mondial à 48 équipes. Ce n'est pas normal qu'un pays comme la Zambie, qui a été champion d'Afrique, n'ait jamais participé à une Coupe du monde." Prise de parole forte pour un sélectionneur d'une... petite nation.
Elle va dans le sens des avis des membres des clubs et des ligues nationales. Ils sont beaucoup plus virulents. "La méthode employée n'est pas acceptable", pointe Javier Tebas, président de la Ligue espagnole. "Il y a deux mois, Gianni Infantino est venu voir l'association mondiale des Ligues. Il nous a assuré qu'il nous consulterait sur les sujets susceptibles de concerner le football professionnel. Il ne l'a pas fait. Ce ne sont pas des manières. Infantino se comporte comme Blatter, qui prenait des décisions tout seul, sans se soucier de quiconque".
Solide tacle sur le Président de la plus haute instance de football au Monde. Appuyé par l'association européenne des clubs (ECA). Via son président et patron du Bayern Munich, Karl-Heinz Rummenigge, l'ECA a Infantino dans le collimateur. "C'est une décision qui a été prise pour des raisons politiques plutôt que sportives et c'est regrettable." Rummenigge évoque la volonté de Gianni Infantino de soigner son électorat plus que de vouloir faire évoluer le football.
"Nous répétons que nous ne sommes pas favorables à une expansion du Mondial", clame le patron du Bayern. "Nous ne voyons pas l'intérêt de changer l'actuel format à 32 équipes qui a fait ses preuves comme meilleure formule. La question est: pourquoi agir dans l'urgence alors qu'il y a encore 9 ans avant de mettre en application un nouveau format, sans impliquer les parties (dont les clubs) qui seront impactés par ce changement. Nous analyserons en détail les impacts et évoquerons ce sujet à notre prochain bureau directeur fin janvier".
Si les clubs sont aussi remontés, c'est surtout parce que ce sont eux qui payent les joueurs qui s'illustrent lors des Coupes du Monde. Les risques de blessure pourraient être plus importants et les clubs estiment qu'une formule à 48 équipes ne relèvera pas le niveau.
De son côté, Massimiliano Allegri, le coach de la Juventus opte pour la patience et l'observation. "48 équipes c'est beaucoup, voyons comment ce format sera mis en place. Le football change, les décideurs du foot cherchent à accroître les bénéfices. Maintenant, le football, c'est du spectacle et du business. Du point de vue de coach de club, il y a trop de sélections dans ce format. Si j'étais sélectionneur, je serais sans doute content".
Le business entourant le football est effectivement un point central de ce dossier. Certains ne sont pas dupes et condamnent une exagération de la FIFA. "Ce n'est pas fait pour des raisons sportives, mais purement pour des raisons financières. Ce ne sera plus ce que c'était dans le passé: une compétition pour l'élite", souligne Damian Collins, homme politique anglais, co-fondateur d'un lobby "New FIFA Now" pour réformer la Fifa.
Et puis, il y a les échos positifs. Les supporters d'une réforme qu'ils jugent plus ouverte. "Nous sommes ravis du passage à 48 équipes en 2026. C'est positif, notamment pour les petites nations. Cela permettra à plus de fans dans le monde de croire en une qualification de leur pays. Cela permettra à ces petites nations d'investir dans des structures footballistiques et dans le football des jeunes", déclare Stewart Regan, directeur exécutif de la Fédération écossaise.
Pour lui, cela va permettre à plus de joueurs de goûter à cette compétition exceptionnelle et cela promettrait des surprises que seul le sport peut offrir. "Les exploits du pays de Galles, de l'Islande et de l'Irlande du Nord à l'Euro 2016 ont montré quels bénéfices un tournoi pouvait tirer des petits pays participants. Une plus grande mixité des cultures footballistiques à la Coupe du monde va créer une meilleure ambiance".
Enfin, les voix des pays africains sont évidemment enchantées par cette décision. Ce sont principalement elles qui ont fait pencher la balance en faveur d'Infantino. Elles se retrouvent car elles estiment qu'une plus grande place sera accordée au football africain. "C'est très bien car il y aura plus d'équipes africaines qualifiées. C'est positif", a confirmé Phillip Chiyangwa, président de la Fédération du Zimbabwe.
Une formule contestée décidée d'une manière contestable. La Coupe du Monde à 48 équipes va encore faire parler avant même de débuter.